Nom

Par adoption, rejeton de la longue lignée de Sade. Il tient secret son autre nom, celui qu’il a porté dans sa prime enfance. C’est moins un usage établi qu’une sorte de pudeur ; comme dans ces cultures étranges et révolues, qui voyaient dans la connaissance du « vrai nom » une arme redoutable. Quoi qu’il en soit, les de Sade, avec leurs usages anciens, l’ont accueilli à bras ouverts. En prenant leur patronyme, il est devenu de leur sang ; et il suit leurs traditions, des visions qui font tourner sa tête dans son sommeil hypnotique aux longs voyages initiatiques qu’ils entreprennent aux quatre coins du monde.

Prénom

Ira comme le mot latin pour la colère ; Ira, deux syllabes tout juste, presque un nom de femme. C’est tout ce qu’il a gardé de sa prime enfance : ce mot dont les Français tordent la sonorité. Les accents le font sourire. Dans son pays natal, il se rapporte à une divinité du vent : un messager juché sur une antilope, voyageur, purificateur. Dans les replis de ses papiers d’identité se niche son deuxième prénom, Sanjay, qu’il utilise parfois dans ses voyages.

Naissance

A la fin du printemps 1895, dans le port indien de Surate, dans le Gujarat. La vieille ville de son enfance était historiquement proche de l’Angleterre et, avec elle, du reste de l’Europe ; les dynasties sang-purs en contact étroit avec leurs homologues d’Occident. Aussitôt que le don convoité s’est manifesté, l’échange a eu lieu : un enfant parmi sept, pour une montagne de faveurs.

Parents

Du jour au lendemain, il est devenu le deuxième enfant de la branche aînée des de Sade ; fils chéri de Folco de Sade et de son épouse, Colette. Son père est mort depuis un an maintenant : il a emporté avec lui ses souvenirs, ses mystères, et la ligne de rides sages qui tranchait son front. Dans la famille de Sade, Ira occupe la position inconfortable de jeune chef de famille. Son frère aîné, Calendal, ne détenait pas le don qui fait la fierté de la dynastie ; alors la chevalière a roulé jusqu’à ses pieds, toute de rouille et d’or. Ils partagent parfois leur vieux chateau, juché au sommet de son roc de calcaire. La cohabitation est malhabile, et leur amour teinté d’un fond d’amertume.

Nature du sang

Des registres anciens dans les lignes élégantes du Gujarati en attestaient sur sa terre natale : son sang est pur. Alors son nom romanisé a trouvé sa place dans ceux, plus austères, des archives de France.

Situation matrimoniale

Pèlerin solitaire, même si cette solitude n’a jamais été des plus pures. Il s’éprend parfois de femmes comme d’autres s’éprennent de muses : alors il les charme avec ses émerveillements d’enfant et ses jeux ridicules, fait danser des araignées de papier et caresse les sillons de leurs mains. Et puis il y a cet amour plus rare mais plus profond, pour des hommes et leurs bras durs. Il gravite autour d’eux, timide et fasciné comme un papillon autour d’une flamme.

Occupation

Comme des générations d’enfants de Sade avant lui, il est cet être silencieux qui se tient aux côtés des grands. Quelque part entre le voyant et le vieux sage, il conseille, à la lumière de ses visions prophétiques. Occasionnellement, il attribue aussi aux nouveaux-nés des familles qui peuvent s’offrir ses services les prénoms que lui inspirent leurs destinées entrevues ; l’occupation porte le nom bien peu poétique de visionomeur. C’est la part qu’il préfère de sa carrière de voyant : plonger ses yeux dans ceux, candides, de nouveaux-nés qui ne sont encore qu’espoir.

Scolarité

Il parlait à peine français quand il est arrivé à Beauxbâtons. Sa langue peinait alors à exprimer la profondeur de sa passion ; il souriait timide à défaut de pouvoir noyer les autres sous ses lubies. Certains s’étonnaient de son affectation à la faction de l’Aurore. Et puis, au fil des années, le calme apparent laissait place à des sursauts de rires et d’enfantillages. Il délaissait ses études pour rêver d’ailleurs, écrivait des poèmes comme des songes éveillés, et puis racontait à qui voulait l’entendre les voyages qu’il n’avait effectué que dans sa tête.

Composition baguette

Une longue baguette de pin, un peu plus de trente centimètres. Sa base est prise dans un manche simple mais finement ouvragé, fait des essences croisées d’un cyprès et d’un tilleul – les deux arbres qui veillent sur le domaine de sa famille. Ces dernières années, il a fait graver ce manche d’un motif : les étoiles de la constellation de la grande ourse s’y enroulent et s’y répètent. Souple et très fine, la baguette contient un cœur de ventricule de dragon. Il la garde dans un repli de son manteau, ou des veste de costume qu’il arbore dans le monde moldu ; il s’en sert peu, sommes-toutes, il a toujours été assez mauvais aux sortilèges domestiques par lesquels les sorciers allègent leur quotidien.

Patronus

Il s’est entraîné avec une obsession puérile, juste pour la beauté de voir l’animal se déployer, danser en volutes d’argent. La bande blanche sous son cou permet de reconnaître un ours à collier, qu’on voit parfois hanter les confins de son Inde natale. Au quotidien, la créature ne sert pas à grand chose ; mais dans des moments d’ennui, il aime à la voir sauter et courir, ou fendre l’air pour aller marcher aux côtés de ses amis. Dans ses rêves prophétiques, il se voit rarement sous forme humaine : il y devient lui-même un ours d’argent, dont la lourde tête se tord dans le bleu et dans l’orage.

Epouvantard

Dans les cercles surréalistes avec lesquels il frayait, il y a quelques années à peine, dans le Paris de l’art, il s’est un jour réveillé d’un sommeil hypnotique avec une peur qui paralysait ses os. « Qu’as-tu vu, Ira? » lui a alors dit le poète moldu dont il partageait la couche : « La mort ». Une terreur d’enfant. Elle prenait la forme d’un gouffre sans fin, d’oubli et de solitude, que son patronus couvrirait de ses danses.

Amortentia

Il est piètre potionniste, mais de meilleurs que lui lui ont déjà fait respirer leurs créations. L’odeur de la peau chauffée par le soleil, des pavés parisiens battus par la pluie et de l’encre juste versée s’y mêlaient étroitement ; une fragrance profonde et terreuse.

Particularité Magique

Voyant de naissance, il lui semble ; les rêves ont commencé à cet âge tendre où l’imagination ne connaît pas encore de bornes. Il a mis longtemps à démêler le vrai du faux. Mais, aujourd’hui, il sait reconnaître la brume particulière des visions véritables : ces symboles qu’il a appris à décrypter avec fiabilité, les visages trop inconnus pour être improvisés. Il fait partie de cette classe toute particulière de voyants qui ne sont pas que prophètes : certains rêves, quoique bien plus rares, concernent le passé plutôt que l’avenir ; il emporte leurs histoires dans le présent comme un cadeau précieux. En contrepartie, son domaine est celui du sommeil et du sommeil uniquement : feuilles de thé, cartes, fumée n’ont aucune influence sur son don.